Chronique numéro 1 : Avant la tempête (Cycle de l'Eau)

Je frémis quand il parle de mon père mais ne dit rien, ayant reçu ma leçon sur le sujet la veille. Hochant la tête, je le suis sans rien dire, tentant de faire apprendre la patience à mon coeur.

Le vagabond inspira profondément avant de répondre Jiang Wen.
Je n'ai aucune envie que les valeurs du Song ne nous mène au massacre. Je crois à la paix et à l'harmonie, et je pense que c'est ce que nous recherchons tous. Or avec les Jins à nos portes ceci est impossible.
Rester en vie est certe une priorité, mais garder sa liberté et choisir sa façon de vivre et mourrir me semble encore plus important. Chacun doit être en mesure de faire ce que bon lui semble, suivre ses valeurs, suivre le Song, ou encore accueillir les Jins.
Il me semble toutefois que si nous avons aujourd'hui autant de réfugié à la forteresse, c'est que ces gens espéraient trouver ici un refuge et une protection contre les Jins. Traiter avec l'ennemi revient donc à inviter ceux que ces gens ont fuit à venir directement les prendre chez nous.
Pour les protéger, s'il faut que j'aille moi-même tuer ce Nuarchi alors j'irai... Si c'est le seul moyen de ramener l'harmonie dans le Song et au delà, alors je suivrai ce chemin de sang et de violence...
Néanmoins, avant mon départ, je demanderai simplement un peu de repos et que la promesse que rien ne sera fait contre Wang.

Ceux qui auraient fixer le regard du vagabond y verraient d'ardentes lueurs et une conviction à toute épreuve.

Yu Yan adresse un signe de tête à l'officier et lui désigna d'un signe du menton l'homme qui s'échappait.

- Vous devriez commencer par arrêter le modeste serviteur Ding que je vois partir subrepticement. Après avoir discuté de ce qui s'est passé avec mes camarades et examiné les affaires du maître, je pense qu'ils seront en mesure d'identifier celui qui est le vrai responsable de tout cela...

Elle sortit de sa manche le livre de comptes du vieil homme et le tendit à la jeune An Lei, lui adressant un sourire d'encouragement.

- En sa qualité de fille adoptive de Maître Jiao Hai Deng, c'est à elle de vous remettre ceci. Je tiens tout d'abord à dire que je n'ai pas été contrainte d'exercer mes talents avec la troupe du vieux maître, et ce même si je n'ai intégré les effectifs de la troupe que très récemment et par le plus grand des hasards, je dois bien l'avouer. Je cherchais du travail pour ne pas être un poids mort dans la forteresse, pour subvenir à mes besoins et vivre dignement et je me suis tournée vers ce que je savais faire le mieux : danser.

Elle réfléchit quelques instants avant de poursuivre :

- La troupe disposait de quantités d'instruments de musique, de nombreux accessoires d'opéra de qualité exceptionnelle : costumes, armes, bijoux et parures, tout semblait avoir été acheté à prix d'or. Les théâtre de rue de ma connaissance et leurs conditions de vie n'avaient absolument rien à voir et pour moi, c'était le signe qu'elle devait probablement jouer autrefois devant les officiers et les lettrés importants du Da Song. Je ne voyais aucune autre explication possible à cette profusion de biens.

Elle regarda les gens assemblés autour de la table et continua ses explications.

- J'avais bien remarqué la façon dont tout le monde m'avait regardée quand j'étais entrée, et les armes à l'aspect un peu trop réalistes... Il y a des acteurs qui utilisent des armes réelles pour les scène d'acrobatie, et certains extrémistes poussent le réalisme jusqu'à se battre sans arrêter les coups afin de donner une dimension supplémentaire à la scène. Une seule erreur peut faire courir de graves risques à l'interprète mais symbolise ainsi la perfection de la maîtrise théâtrale. Ces petits détails pouvaient passer pour insignifiants.

Elle croisa de nouveau ses longues jambes gainées de soie blanche, observant les gens qui l'écoutaient.

- Lorsque vous faites partie d'une troupe sous la férule d'un maître, c'est comme si vous faisiez partie d'une école d'arts martiaux. Ce que dit le maître est sacré et vous devez lui obéir en tout. Vous ne mettez jamais en doute ce qu'il dit, ni le bien-fondé de ses décisions. Jamais nous n'aurions pu nous douter tous les trois que les autres acteurs étaient en train de préparer un attentat contre le général puisque Jiao Hai Deng les avait engagés. C'était tout simplement impensable ! Avez-vous des questions ?

Lin Xiao Yu écouta patiemment tout ce que chacun avait à dire, sans interrompre les intervenants. Après tout, elle n'était pas la mieux placée pour prendre les décisions.
Quand Yu Yan fit le récit des événements, elle l'écouta avec attention. Lorsqu'elle eut terminé, Xiao Yu se toussota pour indiquer qu'elle avait quelque chose à dire.

"– Si je puis me permettre, j'ai une question à poser. "

Elle marqua un petit temps d'arrêt pour être sûre que personne n'allait prendre la parole en même temps : dans ce genre de réunions, il fallait à tout prix éviter la cacophonie.

"– Visiblement, les assassins qui faisaient partie de la troupe étaient des professionnels de l'assassinat. Particulièrement doués et précis, et ils savaient ce qu'ils faisaient. Ils n'en étaient pas à leur coup d'essai. Quelqu'un sait-il si on leur connaît d'autres cibles auparavant ? Peut-être que leur style pour le moins frappant a déjà été observé sur une autre scène de drame sanglant ? Cela pourrait nous donner des indices sur la personne qui les a engagés. Et qui a probablement payé Ding pour servir d'intermédiaire. Ding, qui a d'ailleurs tenté de me soutirer des informations confidentielles à mon arrivée. "

Yin Qiu écoutait les débats, pensif.
Les arguments de Jiang faisait écho à ses propres craintes, celles de se laisser obnubilé par l'héroïsme au mépris des souffrances du peuple qu'il avait pourtant juré de protégé...
Toutefois, il refusait d'abandonner la forteresse ou de se rendre aux barbares. Pour aller où, de toute manière ? Si la forteresse tombait, c'était la fin du Nord. Avec répugnance, il craignait que les parvenus de la capitale étaient trop mou pour risquer une campagne de grande ampleur : ils atermoieraient tant et si bien que le Nord serait abandonné aux mains des barbares, et son peuple avec... Inadmissible !

"Concernant l'armée ennemi, le capitaine Ma Huo Yan pourra peut être nous en dire plus. S'il a pu s'acquitter de sa mission, il a peut être pu saboter les plans ennemis... Quant aux vivres, peut être que les Spectres Blanc pourraient nous dégotter une route caché de ravitaillement, maintenant que la forêt a été purgé de ses soit-disant esprits maléfiques. Tout n'est pas perdu, loin s'en faut." lança l'eunuque, pour ranimer le courage défaillant des défenseurs.

Il soupira, se remémorant son passé, où l'armée de son seigneur était arrivé pour défendre une ville déjà conquise, traitresse surprise au combien désagréable... Il ne souhaitait pas pareil malheurs à d'éventuels secours de l'armée Song.
"Et si nous renforts sont en retard, c'est qu'ils doivent se frayer un chemin parmi les lignes ennemis, sans parler du mystérieux groupe qui nous mets des bâtons dans les roues. Mais gardons confiance : même si cela a été difficile, Dame Lin Xiao Yu et sa troupe ont réussit à venir à nous. D'autres pourront faire de même. Vous devriez d'ailleurs donner toutes les informations sur la forteresse et ses gens à l'estimée stratège du Dali, afin qu'elle nous suggère un plan de défense."

Puis vint l'interrogatoire de la sculpturale danseuse, qui d'une remarque pointa un serviteur au comportement suspect.
Yin Qiu poussa un juron et bondit illico pour prêter mains fortes aux soldats et arrêter l'homme au besoin.
"Vous, là ! Arrêtez-vous !" somma-t-il de sa voix aiguë. Il n'avait que la parole de Qing Yu Yan, mais il ne songea pas un instant à la mettre en doute...
L'eunuque avait pourtant prévenu Wang de se méfier des espions !

La demande sentencieuse de Bai Hou figea un instant les réactions de tous le monde....

- Vous...Vous vous proposez d'assassiner Nuarchi ? C'est de la folie !

Mais la remarque de Yu Yan sur l'évasion imminente d'un espion envoya une seconde claque à Jiang Wen

- Comment ? Je...Que l'on fasse mettre cet homme aux arrêts ! Immédiatement ! ordonna t-il en désignant la direction prise par Ding. Quiconque me rapporte le chef des serviteurs de l'aile militaire aura une récompense de 40 Taels...Faîtes circuler le mot !

Les gardes saluèrent l'officier avant de se ruer vers la sortie à la poursuite du Xia

- Je ne comprends pas ajouta la cheftaine après le récit de Yu Yan Pourquoi ce vieil homme aurait-il engagé une armée d'assassins ? Qui peut se permettre de payer une telle troupe ? De plus, vu leur ardeur au combat...ils devaient être sous l'emprise de drogue, ou complètement fanatisés...Y'avait-il des produits étranges chez votre ancien maître ?

Lin apporta une partie de la réponse escomptée....

- Lin gu niang, il ne fait aucun doute que leurs objectifs ne sont pas forcément les mêmes que ceux de Nuarchi.

La solution de Yin Qiu fit bondir Jiang Wen

- Vous voulez dire que nous aurons recours au banditisme pour fournir nos troupes en nourriture ? C'est....C'est plus que je ne l'imaginais...Ce plan me semble...

Mais déjà l'eunuque s'était lancé à la poursuite du fugitif....
La cour était déjà envahit par la garde, encerclant la demeure de Ding dont la porte était close.


- Sortez d'ici, au nom du commandant de cette forteresse....Vous êtes mis au arrêt cria le lieutenant de la garde, dont la troupe au complet se trouvait autour du bâtiment, torche en main, lance dans l'autre...

[HRP : Xiao Guang, je créerai un topic à part dans la soirée]

Excédée par le spectacle affligeant auquel elle assistait, Yu Yan prit la parole, fustigeant la passivité de tous ces hommes qui se disaient guerriers.

- Peut-être devriez-vous arrêter les sommations d'usage et forcer la porte de ce chien sans honneur ! Si vous souhaitez le laisser s'échapper, le meilleur moyen est encore de rester planter devant chez lui en attendant le moment improbable où il se décidera à ouvrir. Vous ne croyez pas qu'il va se débarrasser des indices et des documents qui l'accablent pendant que vos hommes s'égosillent dans la rue ? Par tous les dieux, mais agissez donc !

Et comme personne ne semblait faire un tant soi peu attention à ce qu'elle avait dit un peu plus tôt, la danseuse secoua la tête et leva les yeux au ciel, consternée par ce à quoi elle assistait. Elle s'avança donc avec le livre de comptes à la main et l'ouvrit à la page qui mettait en cause Ding.

- Je vais devoir me répéter... Cette jeune personne est la fille adoptive du maître et c'est normalement à elle de vous remettre cela, mais vous n'avez probablement pas entendu ce que je viens de dire. Vous trouverez dans ce livre de comptes les preuves qui incriminent ce serviteur dans tous ces événements. Vous devez savoir que la situation de la troupe était difficile jusqu'à ce que l'argent et les acteurs de cet homme viennent améliorer les choses.

Elle se tourna vers ses deux compagnons et leur glissa quelque chose à l'oreille, puis reprit.

- Le maître a subi une très grande perte dans sa vie, sa femme et sa fille, Lin et Mi San, ont été tuées à Shua Zhuang il y a une dizaine d'années par l'armée Song. Il rendait le général Wang responsable de la mort de sa famille et il a vu l'occasion de la venger durant cette représentation. Après leur passage à Shua Zhuang, le groupe a financé une dizaine d'enterrements et une grande partie des acteurs ont quitté la communauté. Les dettes se sont accumulées car les représentations se faisaient de plus en plus rares. Il a été approché à Jilin par un riche marchand, un mécène qui a renfloué les caisses de la troupe et lui a permis de décrocher de nombreuses représentations répondant au nom de Ding. C'est sans doute lui qui a payé la stèle funéraire de la famille du maître. Une troupe entière de nouveaux acteurs de Jilin a alors rejoint le groupe qui a poursuivi ses tournées, tandis que les dons de Ding ont continué d'être généreusement versés.

Après un instant de silence pendant lequel elle laissa aux autres le temps d'assimiler ces informations, elle continua à parler.

- Ces acteurs sont responsables de la mort d'un de mes compatriotes ici et toute notre petite communauté serait je pense positivement ravie que vous nous livriez le coupable. Nous saurons quoi en faire si vous ne parvenez pas à vous décider sur son sort...

Contre toute attente, elle ajouta :

- Quant à aller tuer Nuarchi dans sa tente... Je vous souhaite bon courage, à vous et à tous les va-t-en guerre que j'entends depuis tout à l'heure, parce que si vous y parvenez, il n'y aura rien dans ce monde qui pourra sauver la vie de n'importe quoi de vivant dans cette forteresse. Vous ne vous rendez pas compte de l'écrasante responsabilité que représente la protection de tous ces gens qui vivent ici. Non, vous ne vous rendez pas compte sinon vous n'envisageriez même pas de prendre ce risque. Je réfléchis depuis tout à l'heure à un moyen d'épargner l'orgueil des uns et la vie des autres, et je crois que j'ai trouvé.

Intriguée par les propos de la danseuse, Xiao Yu la regarda avec intérêt.

Lorsque celle-ci eut terminé, la jeune femme prit la parole :

"– J'ai pour ma part réfléchi à la construction de défenses qui permettront à la forteresse de tenir, le temps que nous décidions soit d'évacuer les civils, soit d'opter pour un plan de secours quelconque si quelqu'un en a un. J'ai tracé des plans précis, et ces fortifications sont réalisables avec les moyens dont nous disposons, j'y ai veillé.

Cependant, je suis tout à fait curieuse d'entendre les bonnes idées de chacun : à mon avis, c'est d'une réflexion collective que nous tirerons le meilleur parti. Aussi aimerais-je entendre la proposition de Qing Yu Yan. "

[Oui ? Non ? Peut-être ?]

[HRP]
Désolé du temps de réaction : trop de boulot pour jouer du bureau cette semaine, plein de chose à faire le soir et épuisement, sans compter un week-end chargé...
[/HRP]

Yin Qiu constata une fois de plus le problème inhérent à une armée et une bureaucratie rigide : un manque criant d'initiative.
Répondant aux sarcasmes logiquement excédé de Qing Yu Yan, il ordonna d'un ton sec à deux soldats d'aller chercher quelque bélier.

L'eunuque quant à lui fit promptement le tour du bâtiment, à la recherche d'une fenêtre à défoncer aisément à grand coup de pied ou à crocheter à coup de dague.
Le traitre avait fuit avec panique et n'avait surement pas eut le temps de se barricader avec efficacité...

Yin Qiu ne craignait pas temps la disparition de document ou de preuves, mais un suicide du coupable, ce qui les priverait à la fois d'une source d'information à tortur...interroger et d'un bouc émissaire à donner en pâture au peuple et aux soldats... Manoeuvre détestable il est vrai, mais ils étaient en temps de guerre.

J'ai déjà fait part de mes idées.
Si vos plans résident dans la protection de la ville et de la forteresse, rien ne nous empèche de faire les deux : se défendre et attaquer !


[HRP]Désolé pour ce post des plus concis... Je n'ai pas vraiment d'idée et pas grand chose à ajouter pour le moment.[/HRP]

- Hé bien, c'est en fait assez simple. Nuarchi veut raser la forteresse parce que c'est le siège de la résistance et qu'il considère que cette résistance est un affront personnel. Il ne fait pas mystère du sort qu'il réserve au général Wang lorsqu'il prendra cette place-forte. J'ai bien dit quand, je n'ai pas dit si. Or, la situation a changé grâce à l'attaque provoquée par Ding. Nous avons une opportunité de prendre l'avantage d'une façon un peu inattendue.

Yu Yan marqua une pause et regarda les personnes présentes.

- Wang est blessé, mais qui va aller vérifier qu'il est bien mort si nous disons qu'il est mort de ses blessures ? Si nous lui présentons un corps et que nous certifions qu'il s'agit de lui ? Personne. Si bien sûr vos hommes se décident à arrêter le traître, honorable Jiang Wen. Alors j'ai pensé que si quelqu'un va le trouver et lui dit que l'objet de sa colère n'est plus, et qu'il n'a donc plus de raison de raser la ville si elle se rend, et que si ce quelqu'un se montre suffisamment persuasif pour le dissuader de justement raser cette ville... Hé bien nous éviterons à toutes les choses vivantes, hommes, femmes, enfants, vieillards, animaux, qui sont entre ces murs de mourir de la plus atroce des manières.

Elle prit une inspiration et se lança.

- Je connais Nuarchi. Je le connais bien. Il a racheté mon contrat lorsqu'il a pris Jilin et j'ai profité d'une attaque sur la troupe qui m'emmenait vers le nord pour m'enfuir. Il n'aime pas perdre ce qui lui appartient mais je sais que j'ai de l'influence sur lui. Si je parviens à le convaincre de ne pas détruire Tian Chi, il m'écoutera. Et s'il est trop en colère contre moi, il me tuera. Dans un cas comme dans l'autre, vous ne perdez rien. Une vie contre des milliers d'autres. Ma proposition vous intéresse-t-elle ?

Salle de guerre

Jiang Wen fixa un instant la danseuse, coi, puis ferma les yeux....

- Si vous êtes sûre de votre influence sur lui, je préfère nettement cette solution...C'est un lourd sacrifice que vous nous proposez...

La cheftaine le coupa immédiatement

- En effet...Pour quelle raison vous placeriez vous dans un tel risque ? Qu'y gagnerais vous, vous n'êtes pas un membre de l'Empire...

Jiang Wen siffla à son tour contre elle

- Silence ! Quelle attitude face à quelqu'un qui nous propose une aide aussi...

- bien tombée... termina la femme en fronçant les sourcils... En deux fois, je vous rappelle que l'humble danseuse se trouve à deux places cruciales...

Extérieur

Lorsque Yin Qiu aperçut la fenêtre de papier qui donnait sur la demeure du serviteur, il n'eût aucune difficulté à pénétrer dans le bâtiment.
Là, ses craintes se révélèrent exactes : Ding, le visage aussi jaune qu'une plaque de cire, gisait sur le sol, les mains crispées sur une fiole odorante entièrement vide...
Quelques instants plus tard, la garde enfonçait la porte de la maison et se retrouvait face à l'eunuque...

- Que s'est-il passé ?! fit le lieutenant en charge, éberlué

- Non, elle a raison de poser la question. Je comprends tout à fait que je puisse vous inspirer de la méfiance et c'est le contraire qui serait étonnant. Je trouverai toujours un moyen de m'en sortir, soyez-en sûrs. Je ne m'en fais pas pour moi, c'est déjà trop tard, Ding a crû qu'un peu de poison me ferait céder à ses avances. L'imbécile...

Elle croisa de nouveau les jambes, le coude négligemment appuyée sur la table près d'elle.

- Vous pouvez ne pas me croire, ou bien me rire au nez, ou bien me tuer. Cela ne changera rien au fait que tôt ou tard, Nuarchi forcera les portes de Tian Chi et vous massacrera tous jusqu'au dernier. Je vous propose une manière de vous en sortir avec les honneurs. Je connais le général, je sais que je peux au moins essayer de le faire changer d'avis. Je ne cherche ni la gloire ni l'argent. Seulement, il y a des gens dans cette forteresse que je n'ai pas envie de voir mourir, c'est tout.

Le calme dont elle faisait preuve venait appuyer un discours somme toute parfaitement logique.

- Je ne perds que ma vie si je mets Nuarchi en colère. Peut-être que ma prochaine réincarnation sera meilleure que celle-ci. Mais vous... Vous perdez Tian Chi. Alors que préférez-vous ? Risquer une vie que je mets moi-même en balance ou cette forteresse, et tous ceux qui sont venus chercher votre protection ?

Le vagabond se tourna vers la danseuse : Votre plan à l'honneur de ne nécessité à priori la mort de personne de plus... Non pas que je n'ai pas confiance en vous, mais si vous l'acceptez, je préfère vous accompagner.

La forteresse n'a rien à perdre à me laisser partir non plus. ajouta-t'il ensuite à l'attention de Jiang Wen.

Lin fronça les sourcils.
Elle commença par s'adresser à la danseuse :

"– Cet homme vous a empoisonnée ? Voulez-vous dire que vous êtes condamnée ?"

La jeune femme ressentait une certaine tristesse. La bassesse de certains ne cessait de l'étonner. Elle soupira.

Elle attendit la réponse de la danseuse avant de répondre à Bai Hou :

"– Je ne pense pas que tu auras une chance de passer aussi facilement qu'elle. Si tu tiens vraiment à aller à Jilin et à te rendre utile... j'ai soigneusement étudié les plans de la forteresse, je peux t'indiquer plusieurs passages secrets. Tu pourrais essayer de voir s'ils ont été découverts par les Jin, et s'ils sont gardés. Mais c'est extrêmement dangereux. Et puis, tu pourrais être utile, ici : nous allons avoir besoin de bras pour remettre de l'ordre, aider les blessés, enterrer les morts, et approvisionner du mieux que nous pourrons les réfugiés. "

Yu Yan eut un sourire amusé à la question de la jeune femme du Dali et hocha la tête.

- Condamnée ? Je ne sais pas et peu importe. Si c'est mon destin alors je mourrai. Par contre, je préfèrerais que vous ne m'accompagniez pas, honorable guerrier, même si je vous suis extrêmement reconnaissante de vous être proposé. Les hommes de Nuarchi me connaissent, pas vous. Ils n'auront aucune raison de ne pas vous tuer. Et pour tout vous dire, je serais plus tranquille pour négocier si je sais avec certitude que personne d'autre que moi ne prend de risque. Vous serez bien plus utile ici, à aider les gens de la forteresse à organiser les défenses, croyez-moi. On ne doit pas écarter la possibilité que j'échoue et là... Vous serez seuls face à la Terreur du Nord.

Elle eut un sourire délicieux et agita la main, comme si elle écartait par ce simple petit geste les périls et les craintes de tous.

- Et si je réussis, hé bien je demanderai une maison dans le Yamen pour mes vieux jours ! J'aime beaucoup la région !

Yin Qiu soupira en voyant le corps du traitre. Il avait bien deviné.
Prudemment et à l'aide de la manche de son Han Fu, il s'empara de la fiole de poison vide, se gardant de la toucher directement ou d'en respirer d'éventuelle effluves.
"Cet espion a préféré la mort à la capture et c'est suicidé..." annonça-t-il au lieutenant qui pénétrait bien trop tardivement sur les lieux. "En tout, si des doutes sur son implications existait encore, les voilà fort théâtralement dissipés."


Agissant toujours en chef, la voix ferme (mais fluette) malgré la fatigue, l'eunuque donna ses ordres pour occuper la soldatesque.
"Lieutenant, faite venir des hommes de confiance et emporté le corps pour le confier à nos médecins. Il serait de bon ton de s'assurer de son réel trépas, il existe des poisons ou des artistes martiaux capables de feindre la mort. De plus l'examen du cadavre pourra peut être nous en apprendre plus sur la réelle identité de cette homme... Ensuite, évidemment, il faudra lui donner une sépulture, même si j'ignore s'il la mérite..."

Yin Qiu réfléchit, le temps que l'homme acquiesce à ses instructions. Puis il poursuivit, toujours d'un ton déterminé et sûr de lui.
"Enfin, prévenez le reste de vos hommes et mettez-les en faction autour de la maison de ce félon. Personne ne doit y entrer avant que nous aillions fouillé convenablement l'endroit... Nous y trouverons peut être des indices sur les employeurs ou les plans de ces fourbes. Mais nous devons nous assurer qu'il n'y a pas d'autres agents de l'ennemi qui pourrait venir effacer les preuves..."
Cela incluait d'ailleurs le militaire, ce que l'eunuque garda bien de préciser. Comme Qing Yu Yan, il avait jugé la réaction des soldats bien molle. Etait-ce juste la panique et le désarroi face aux récents événements ou bien y avait-il d'autres pommes pourries dans le panier ?

Yin Qiu jeta rapidement un coup d'oeil dans le logis, à la recherche de documents compromettants dont le traitre aurait pu se débarrasser en toute hâte (notamment par le feu).
Ensuite, l'eunuque sorti, rejoignant les autres tout en vérifiant que le soldat sortaient également et commençait la garde.

"Notre cher ami Ding est allé rejoindre ses ancêtres..." lança-t-il à la cantonade. "Là encore, il a fait usage de poison pour se suicider... J'ignore pour l'instant qui se cache derrière tout ça, mais il sait susciter une certaine loyauté, probablement par la terreur... Pourtant... Je ne vois pas la patte de Nuarchi derrière tout ça. Un serviteur des Jin n'aurait-il pas préféré combattre jusqu'à la mort ou à défaut se suicider par la lame ?"

- Pour moi, c'est entendu... Je remets ma confiance entre les mains de Qing guniang... fit Jiang Wen... Si vous pensez avoir autant d'influence que cela sur Nuarchi, alors c'est notre dernière chance....

- La dernière chance pour un couard de s'en tirer vivant.... siffla la cheftaine qui jeta un regard sombre à la courtisane

- Je refuse de prendre le risque d'envoyer un assassin se défaire du chef Jin. Nous avons pu apprécier vos talents lors des derniers évènements, Maître Bai Hou, mais c'est une toute autre affaire que de tuer dans l'ombre. Si jamais, comme le précise dame Qing, vous veniez à être démasqué, nous serions tous perdus.

La solution diplomatique envisagée laissait un goût d'amertume dans l'esprit des partisans de la résistance, et l'assemblée sentait que ni la cheftaine, ni les rares officiers militaires n'appréciait le fait que les efforts de Wang furent ainsi réduits à néant...
Pourtant, d'un point de vue politique, c'était probablement la réponse la plus pragmatique à la menace Jin.

- Je crois que nous sommes fixés, termina Jiang Wen d'un ton qui se voulait ferme.

A l'extérieur du pavillon, on transportait la dépouille mortelle de Ding, tandis que Yin Qiu faisait irruption dans la pièce.

- Une mort bien trop douce pour ce conspirateur acquiesça l'officier, un air dépité sur le visage

Xiao Yu n'était pas entièrement satisfaite. La solution trouvée laissait bien des choses en suspens. Elle prit alors la parole d'une voix claire :

"– En attendant de voir si les efforts de Qing Yu Yan seront couronnés de succès, nous ne pouvons pas rester les bras ballants. Il faut améliorer les fortifications de la citadelle, au cas où ces négociations échoueraient : seule une défense efficace permettra aux réfugiés qui le souhaitent d'évacuer par les sorties secrètes que Wang avait prévues et a fait aménager. Et nous n'aurons pas le temps de mettre en place ces fortifications lorsqu'il sera trop tard. Dans le doute, il faut prendre des mesures d'urgence. "

Elle sentait dans son vêtement la présence rassurante des plans de fortification qu'elle avait tracés.

- La seule chance pour un couard de s'en tirer vivant, dites-vous ? Mais rien n'est moins sûr... Rien ne vous dit qu'il ne demandera pas à ce que les officiers qui ont servi Wang soient exécutés. Par contre, s'il accepte la reddition de la cité, il épargnera les gens sans défense qui avaient choisi de venir se réfugier ici et que le général avait pris sous sa protection. Croyez-vous que c'est facile pour Jiang Wen da han de choisir l'option qui le déshonore ? Je ne crois pas.

La courtisane se leva et effaça un pli sur la soie de son han fu malmené. Les jusqu'au-boutistes et leur vision étriquée à court terme l'avaient toujours profondément agacée.

- Pensez un peu aux malheureux qui ne mourront pas en se défendant et à leurs enfants qui ne seront pas mutilés, laissés à l'abandon ou vendus comme esclaves. Contrairement à vous qui serez morts glorieusement l'épée à la main, leur sort sera peu enviable. L'avantage non négligeable de la solution que je vous ai proposée, c'est qu'elle n'expose pas la ville au pillage, au viol et au meurtre, donc à la famine, aux épidémies et aux attaques opportunistes des charognards qui suivent l'armée Jin -et qui sont souvent d'anciens soldats du Song, je l'ai constaté à Jilin. En ce qui me concerne, je préfère être taxée de lâche que d'être responsable de la mort de milliers de personnes.

Elle sourit à l'assemblée et s'inclina devant elle.

- Si vous le permettez, je vais me préparer et partir. Comme je l'avais déjà évoqué tout à l'heure et comme dame Lin le rappelle, rien ne vous empêche d'améliorer les fortifications de Tian Chi et de vous préparer à un siège. Je peux aussi échouer.